L'Icône, un Art Sacré
Vivant
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L'Icône, envisagée
depuis l'origine comme un des
éléments constitutif de la foi
chrétienne et intégrée (dans
l'orthodoxie) aux divers rituels par la
vénération, souligne par
là-même la sacralité de cette
discipline.
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Lorsque nous signifions "Art
sacré vivant", nous exprimons l'absolue
nécessité d'une transmission
régulière et fidèle au même
titre que le chant liturgique et le sacerdoce. Et
c'est très exactement ce qui nous permet de
qualifier cet Art sacré de "discipline". Du
reste, nous ne voyons pas comment dissocier l'un de
l'autre sinon par le biais d'une
incompréhension de ce qui est d'ordre
spirituel.
Quant à la réflexion qui
consiste à supposer qu'un Art aussi ancien que
l'iconographie ne correspond pas à la
sensibilité de notre époque, nous
répondrons que les évangiles et la bible
même sont des textes d'un passé encore
plus lointain et aux antipodes de la
sensibilité contemporaine. Pourtant, "aime ton
prochain comme toi-même", nous semble bien d'une
éternelle actualité.
Si Jésus-Christ nous dit qu'il
n'est pas venu changer les écritures,
l'iconographe encore moins ; d'où cette
prière transmise par les Maîtres :
« Seigneur, Maître Divin de
l'univers, illumine l'âme, le coeur et l'esprit
de ton serviteur, guide sa main afin que pour ta
gloire et la beauté de ta sainte église,
elle puisse représenter d'une manière
parfaite et digne ton icône sacrée, celle
de ta mère très pure et celle de tous
les saints. Sauve-le de toute tentation du
démon et pardonne les péchés de
ceux qui, en vénérant ces Icônes
rendront hommage au modèle qui est dans les
cieux » ...
L'Art sacré, par nature, se
situe dans un temps qui n'est pas celui du "monde", et
pour nous, chrétiens, il puise jusque dans sa
Forme, à Sa source, Notre Seigneur
Jésus-Christ Lui-même et par l'Esprit
Saint, au Père. Il réflèchit ce
qui est en haut, non ce qui est en bas.
La Grande Tradition de l'Icône
est en elle-même dépositaire d'une
connaissance immuable et éternelle. Les
clés dont les Maîtres sont les garants,
s'offrent à nous, si nous le voulons. Les
portes qu'elles permettent d'ouvrir figurent comme
autant de voiles qui tombent et découvrent
chacun un aspect de cette Vérité
à laquelle il est fait allusion à propos
"d'orthodoxie"et "d'universalité" (catholique).
Ainsi le cheminement spirituel individuel trouve un
champ d'expérimentation et de
réalisation et permet à chaque
fidèle, par la vénération de
"rendre hommage au modèle qui est dans les
cieux" comme le dit la prière de l'iconographe.
À chacun d'en faire l'usage qu'il convient.
Nous voyons que nous sommes bien loin d'une approche
artistique contemporaine.
« Les historiens de l'art, qui
appliquent le terme d'art sacré" à
n'importe quelle oeuvre artistique à sujet
religieux, oublient que l'art est essentiellement
forme ; pour qu'un art puisse être appelé
"sacré", il ne suffit pas que ses sujets
dérivent d'une vérité
spirituelle, il faut aussi que son langage formel
témoigne de la même source. Tel n'est
nullement le cas de l'art religieux comme celui de la
Renaissance ou du Baroque, qui ne se distingue en
rien, au point de vue du style, de l'art
foncièrement profane de cette époque ;
ni les sujets qu'il emprunte, d'une manière
tout extérieure et en quelque sorte
littéraire, à la religion, ni les
sentiments dévotionnels dont il
s'imprègne, le cas échéant, ni
même la noblesse d'âme qui s'y exprime
parfois, ne suffit pour lui conférer un
caractère sacré. Seul un art dont les
formes mêmes reflètent la vision
spirituelle propre à une religion
donnée, mérite cette
épithète ... » (Titus Burckhardt)
Faisant nôtre cette citation,
que dire de l'art contemporain dont la forme reste,
par nature, subjective, expression exclusive de l'ego
donc définitivement psychique et profane,
quelqu'en soit l'intérêt
esthétique !
Qui a des oreilles pour entendre,
qu'il entende !
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Alain Dufourcq
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